Communiqué
du réseau Archeologia.be
et de Communauté
Historia
Par la présente,
nous dénonçons avec force la destruction insidieuse et méthodique
de l’église Saint-Basile à Couillet, dans un silence
institutionnel aussi assourdissant qu’inquiétant… en vue de la
naissance annoncée d’un futur parking. Un projet électoralement
bien plus porteur pour les édiles locaux qu’une préservation
effective d’un bâtiment emblématique nous semble-t-il…
Érigée à la fin
du XIXe siècle par Basile Parent et ses enfants – figures majeures
du développement ferroviaire belge –, l’église Saint-Basile
constitue un symbole fort de l’essor industriel, social et
religieux de Charleroi. Son architecture néogothique élancée, ses
proportions majestueuses, ses pinacles finement sculptés, ses
vitraux et boiseries remarquables, ainsi que sa galerie en triforium,
rarissime en Wallonie, en font un joyau du patrimoine régional. À
cela s’ajoute un orgue monumental néogothique du facteur Delmotte,
classé depuis 2009, dont les tuyaux ont récemment été volés,
mais qui conserve encore aujourd’hui une très haute valeur
patrimoniale. Un mémorial en marbre blanc orné d’une locomotive à
vapeur, situé près du chœur, rappelle l'engagement de ses généreux
donateurs.
Et pourtant… Le
13 mai dernier, nous apprenions qu’une entreprise avait été
mandatée pour « démonter » le carrelage en pierre bleue de
Tournai. Ces actes de vandalisme s’ajoutent à une longue série de
dégradations commises ces derniers mois, dans un climat de
désinvolture totale. Ainsi, à l’initiative de l’Évêché et
sous le regard complice du CiPAr, des éléments de l’orgue
pourtant classé ont été retirés, le chemin de croix a été
découpé à la disqueuse pour être transféré à l’abbaye de
Maredsous, et désormais le carrelage est arraché de manière aussi
brutale que honteuse.
Alertée, l’ASBL
Communauté Historia a interpellé la direction régionale de l’AWaP
à Mons, qui, fidèle à son habitude, a décliné toute
responsabilité, estimant que la situation ne relevait pas de sa
compétence. Une posture inacceptable.
Informée
également, la Ministre du Patrimoine fit elle aussi un pas de côté.
Une attitude démissionnaire qui nous interroge alors même qu’elle
était informée qu’un recours avait été introduit devant le
Conseil d’État pour toute une série d’irrégularités
manifestes dans ce dossier.
Cette inaction est
d’autant plus inexcusable qu’il s’agit ici de l’un des plus
beaux témoins de l’architecture néogothique en Wallonie –
qualifié jadis par la Commission royale des monuments et sites de «
petite cathédrale de Charleroi ». En laisser méthodiquement
démanteler les éléments revient ni plus ni moins à trahir le
patrimoine public.
D’ailleurs,
comment la Ministre peut-elle détourner le regard dans une affaire
d’une telle gravité ? Où est le sens des responsabilités ?
Comment justifier cette passivité alors que l'incertitude juridique
est manifeste ? Plus préoccupant encore : le permis délivré pour
cette démolition contient ce constat glaçant – et révélateur –
:
"Il est
désolant de constater que l’argent public est dédié à la
démolition du patrimoine bâti en général, et du patrimoine
culturel en particulier, via les subsides libérés par le
Gouvernement wallon"
Cette phrase
illustre le malaise profond au sein même de l’administration, face
à une politique de la table rase qui, dans la région de Charleroi,
frappe un nombre croissant d’édifices religieux, dans une logique
d’effacement et de désengagement.
Fort heureusement,
de son côté, Madame Denoël, inspectrice générale f.f., a
immédiatement ordonné la suspension des travaux en cours. Un sursis
salutaire pour l’édifice !
Face à cette
situation d’une extrême gravité, nous exigeons l’arrêt
immédiat de tous les travaux. Il est temps qu’un véritable
sursaut politique émerge. Il en va de l’intégrité de notre
patrimoine commun, mais aussi de la crédibilité des institutions
censées le protéger.
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