Le 24 janvier dernier, des riverains de la Collégiale Sainte-Waudru de Mons nous
alertent de la tournure "bizarre" que semblent prendre des "travaux de
restauration" menés au sein de la Collégiale Sainte-Waudru, édifice religieux emblématique de la ville de Mons classé au Patrimoine exceptionnel de Wallonie.
Ces derniers ont constaté que, depuis plusieurs mois, un
ouvrier, a priori commandité par un responsable de
l'édifice, réalisent des travaux en ayant recours
à des méthodes de restauration qu'ils estiment
"inappropriées" et en totale contradiction avec les
règles élémentaires de conservation
préventive.
D’après ces témoignages, ces interventions auraient eu des "conséquences catastrophiques" sur une grande majorité des éléments présents au sein de la Collégiale.
Une photo jointe attesta qu’effectivement nous risquions de faire face à un véritable scandale!
Vu la gravité des faits, le 25 janvier 2021 au matin, nous avons contacté le cabinet de Madame Valérie DE BUE, Ministre en charge du Patrimoine culturel.
Notre interlocuteur prit acte de l'info et nous confirma qu'aucune
opération n'était en cours au sein de l'édifice.
Il nous précisa qu'un architecte allait être
dépêché sur place sur-le-champ afin de
vérifier le bien-fondé des allégations
rapportées.
Contactée par nos soins, l'Agence wallonne du Patrimoine (Awap)
confirma également ne pas avoir été mise au
courant ni informée de quoi que ce soit.
Dans les heures qui suivirent, les riverains nous
précisèrent que les derniers "travaux"
réalisés au sein de la collégiale remontaient au
week-end dernier.
Nous sollicitâmes une nouvelle fois la Ministre en
évoquant qu'il était impératif que des experts en
restauration soient envoyés sur place afin de vérifier si
des mesures pouvaient encore être prises au vu de l'intervention
récente.
A cette occasion, il nous fut confirmé que les travaux dénoncés avaient été arrêtés.
* * * *
Ce mardi 26 janvier 2021, nous nous sommes rendus sur place.
Nos pires craintes se sont révélées fondées. Des
dégâts importants, graves et, pour certains,
irrémédiables, ont été constatés.
Toute la collégiale semble concernée.
Ainsi, dans les pas des membres de l'Awap présents sur place,
voici une courte liste des constats posés (une communication
plus conséquente suivra):
- Un bas-relief au-dessus d'un autel près de la sacristie a
été fort détérioré.
L’albâtre est marqué par de nombreuses et
récentes traces de ponçages excessifs. Des traces de fer
sont incrustés dans l’albâtre même. Des
enlèvements de matière sont à déplorer ;
- Plusieurs statues présentent également des traces d'interventions récentes ;
- Des couches de peintures bon marché de couleur blanche ont
été appliquées sur une grande partie des statues
dans la collégiale. De l’acrylique a été
appliquée pour remplacer les anciennes dorures. Les autels et
statues sont pour la plupart touchés ;
- Plusieurs volutes ont été arrachées de l'autel
saint Hilaire (elles sont actuellement entreposées
cachées sous un drap noir près des toilettes) ;
- La cloche du chœur a été complètement
griffée en raison d'un ponçage excessif, l’ange
au-dessus de la cloche a complètement été enduite
d’acrylique ;
- L’ouvrier nous a également fait remarquer que tous les
bas-reliefs de l’église ont poncé à la fibre
de verre ;
- Du béton a été utilisé pour réparer des ornements d’un autel ;
- Le laiton de l’autel numéro 15 a été nettoyé au SIDOL ;
- Les autels ont été nettoyés à différentes reprises à l’eau;
- ...
Crédit photo : Virgil DECLERCQ / Valentin LHOEST - Communauté Historia asbl
Nous sommes effarés devant l'étendue des
dégâts occasionnés et nous sommes
légitimement en droit de nous poser de nombreuses questions sur
les responsabilités à établir dans cette affaire.
Ainsi:
Comment une telle chose a-t-elle pu se produire?
Comment est-il concevable qu’une telle "restauration"
illégale puisse durer plusieurs mois sans attirer l'attention ?
Quel rôle ont joué les Autorités
ecclésiastiques et la fabrique d'église dans cette
affaire ?
Quid de la responsabilité de la Région wallonne?
Nous sommes au début de notre enquête et une kyrielle d'interrogations se pose déjà.
* * * *
Au regard de ce qui précède, nous
demandons à Madame la Ministre de prendre toutes les
dispositions utiles dans l'intérêt de l'édifice.
Nous lui recommandons en particulier de désigner une commission
d'experts chargée d'évaluer les dégâts et de
proposer toutes les pistes envisageables pour une restauration rapide
des éléments touchés.
Nous l'invitons dans ce cadre à recourir aux services de l’Institut royal du Patrimoine artistique (IRPA) afin que puisse être établi un constat technique détaillé.
Nous exigeons par ailleurs que Madame la Ministre se constitue partie civile en déposant plainte contre le ou les auteurs présumés.
Une enquête judiciaire nous semble plus que nécessaire
au vu de l'enjeu financier énorme que représentera une
remise en état des éléments affectés par
des interventions inacceptables.
Il s'agit ici d'une question de
principe, de droit, mais surtout de respect dû à un
élément exceptionnel du patrimoine culturel wallon !
|